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06

     Dans le garage voisin, son coéquipier était déjà là depuis longtemps et s’installait dans sa monoplace, prêt à aller la placer sur la grille. Il regarda sa propre voiture. Elle arborait une livrée spéciale pour cette édition d’Ostal Cristo. La monocoque était entièrement noir, et les sponsors, toutes les inscriptions ainsi que le matagot sur les flancs, étaient floqués d’un vinyle tout aussi noir qui tranchait du reste par sa brillance. Il s’émanait d’elle une aura qui invitait au respect. Il aimait ça.   

 

     – C’était terrible, d’avoir à porter une équipe tout entière sur ses épaules, poursuivit Ricky. Antton avait des gens derrière lui, mais ils attendaient sans cesse qu’il prenne des décisions, alors que lui attendait d’eux des conseils et même plus que ça. Il devait, en plus de piloter, gérer la stratégie, la gestion de l’écurie, des mécaniciens, les questions techniques, économiques, administratives, et j’en passe. J’étais véritablement admiratif de ce qu’il faisait, mais déjà, je craignais qu’il ne brûle trop vite. 

 

     – Tu sais quel est le numéro du pilote que tu as rencontré ? demanda Flo alors que Tallie arrivait dans le pub, juste avant le début de la qualification. 

     Lui et Charlie avaient travaillé en regardant juste avant la dernière séance d’essais de la Mach 1. Ça leur avait procuré une grande nostalgie, beaucoup de frustration lorsqu’ils se rendaient compte des changements survenus ses six dernières années, et aussi beaucoup d'excitation.  

     Tallie secoua la tête.  

     – Je sais juste qu’il s’appelle Antton.  

     – Ah, ils ont parlé de lui, fit Charlie en s’appuyant sur le bar. Il a remporté une place sur la grille de façon exceptionnelle.  

     Flo approuva d’un signe de tête.  

     – C’est lui, fit-il en pointant l’écran du doigt.  

    À l’image, ils virent le jeune pilote se glisser dans le cockpit de sa voiture.  

    – Pourquoi est-elle différente des autres ? s'étonna Tallie.  

    – Ce sont des sponsors, répondit Flo sans détacher ses yeux de l’écran. Son écurie doit être toute petite.  

     La veille, les deux hommes lui avaient expliqué comment fonctionnait la séance de qualifications. Il n’y avait pas de grandes différences avec les essais, seulement que le meilleur temps marqué par un pilote au cours de la session déterminerait sa place sur la grille. Tallie avait été sidérée d’apprendre qu’en Mach 1, parfois, les écuries possédaient des voitures spécialement réservées pour cette occasion, optimisée pour produire une performance au tour. C’était une pratique qui était assez critiquée, et qui tendait à disparaitre avec le temps. La WRC mettait à jour leur règlement toutes les deux à trois saisons, et si les voitures avaient pour obligation de partir de bases similaires, les écuries parvenaient à redoubler de créativité et d’ingénierie pour mettre au point des innovations permettant à leurs voitures de se démarquer sans transgresser les règles. Les Mach étaient similaires dans l’ensemble, mais d’une équipe à l’autre, la monocoque n’était pas toujours la même, les rendant reconnaissables au premier coup d’œil en plus de leur livrée.  

     Le compte à rebours de quarante minutes s’afficha en haut de l’écran, et les voitures s’élancèrent une à une en piste.  

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     Antton quitta sa Mach et garda son casque jusqu’à ce qu’il ait quitté les stands. Il était en colère.  

     – Fais pas la tête, Torres, quatorzième, ce n’est pas si mal, fit John en le rejoignant.  

   – Hier aux essais, je ne suis pas descendu plus loin que neuvième, rétorqua-t-il en arrachant sa cagoule. Si je n’avais pas été gêné dans mon dernier tour, j’aurais pu m’octroyer une huitième place, peut-être même une septième !  

    – La porte des points n’est pas si loin, tu pourrais bien finir la course en étant au moins onzième, chercha à le rassurer Matthew.  

     – Je ne peux pas me contenter de ça ! explosa Antton.  

    John grogna en ayant un geste d’humeur, puis s’éloigna, agacé. Le reste de l’écurie avait déjà remballé la voiture et s’apprêtaient à laisser la place aux Machs 1, qui allaient rouler dans quelques minutes. Matthew resta un instant sur place, sans savoir que dire, puis choisi finalement de s’éloigner pour aller les aider et le laissa seul.  

     Il n’avait pas le temps de succomber à ses émotions, malgré le stress, la colère et la déception qui faisait rage dans son cœur. Il n’y avait pas d’hospitalité pour son écurie, et il n’avait pas le temps de retourner chez Marietta, alors une fois changé, il alla se trouver un coin tranquille dans les paddocks pour étudier les données des dernières sessions de roulages et celles de la qualification. À sa demande, Matthew prenait également en note ce qu’il pouvait des temps des autres pilotes, et lui avait consigné tout ce qu’il avait pu apprendre d’eux, de leur voiture, et de leur pilotage. Il connaissait déjà tout ça par cœur, et le brouhaha qui régnait dans l’enceinte du circuit finit, à la longue, par le distraire tout à fait. Avec un soupir, il appuya sa tête contre le mur derrière lui, et ferma les yeux un moment. Il entendait le vrombissement des voitures qui traversaient la ligne droite des stands, il entendait la foule, il entendait les présentateurs, dont les commentaires, avec tout ce bruit, étaient incompréhensibles. Il étendit les jambes et leva les mains, puis projeta la piste dans son esprit, et s’imagina la traverser au volant d’une Mach 1. Ses mains mimèrent le volant et le passage de vitesse, ses pieds accéléraient, freinaient, embrayaient en rythme. Il s’imagina, séparé de la victoire de moins d’un demi-tour. Il s’imagina, les présentateurs hurlants dans leurs micros, et la foule en liesse, debout dans les tribunes, sautant sur place.  

     Il laissa retomber ses bras en soupirant. Ce rêve n’avait jamais semblé aussi précaire qu’à cet instant.  

     Il croisa le regard de Ricky, qui s’était appuyé sur le mur d’en face en attendant qu’il ait fini. Antton pinça les lèvres en pensant qu’il l’avait vu faire, mais l’ingénieur ne fit aucune remarque.  

     – Le dernier temps de Kantos a été annulé, fit-il en se laissant tomber à côté de lui.  

     – Vraiment ? s'étonna-t-il.  

     Il hocha la tête.  

    – Les commissaires ont estimé que la faute lui revenait et l’ont sanctionné pour conduite dangereuse. Ça le fait tomber à la quatorzième place.  

     Antton grimaça.  

     – Ça fait mal …  

    – Il fallait y penser avant de conduire au ralenti sur la trajectoire. C’est pas mal ce que tu as fait aujourd’hui.  

     – Mouai... marmonna Antton, en calculant quelle était sa place à présent.  

   Il partirait treizième, finalement. Ça ne faisait plus que deux personnes à doubler pour rentre dans les points.  

     – Si, je t’assure. Manchester n’est pas un circuit sur lequel il est facile de gérer le trafic, et pour une première qualif, c’est admirable.  

     Antton haussa les épaules. Il n’arrivait pas à s’en réjouir. Ricky lui jeta un coup d’œil avec un petit sourire. C’était bien dommage que cet incident de course lui empêche de se révéler dès son premier week-end en Mach 2, mais il pressentait déjà que, bientôt, on commencerait à entendre son nom un peu partout.  

 

 

     Ricky quitta la réunion stratégique avec les pilotes Cromwell et ils se rendirent dans la loge de leur écurie pour assister à la course de Mach 2. Les pilotes avaient entamé leur tour de formation, et ils s’installèrent derrière la baie vitrée juste à temps pour pouvoir les voir figer leur monoplace sur la grille.  

     – Une petite préférence ? demanda Jean Serval en se tournant vers le second pilote.  

     – Un peu tôt pour le dire… répondit Ford Dixon.  

Ricky pointa du doigt la monoplace couverte de sponsor qui faisait tache au milieu de peloton.  

    – Le numéro neuf... approuva Jean en croisant les bras sur sa poitrine.  

  Ils se turent le temps que les feux s’allument, puis s’éteigne, et que les voitures disparaissent dans le premier virage.  

     – Je le connais, il me semble, fit Dixon en regardant la télé qui transmettait le Grand Prix en direct. Je l’ai rencontré à Porto Rico. Comment s’appelle-t-il, déjà ?  

     – Antton Torres, répondit Ricky.  

     Il hocha la tête, il se souvenait.  

    – C’est bien, ce concours qu’a organisé la WRC, commenta Jean. C’est chouette que de jeunes pilotes talentueux puissent venir concourir en Europe.  

     – Ils auraient pu aller un peu plus loin, si tu veux mon avis, rétorqua Dixon.  

  Jean tourna vers lui une moue interrogative, mais les grandes exclamations des présentateurs le firent vite revenir vers la télé. Deux pilotes s’étaient sortis dans les esses du bosquet. L’un d’eux était profondément tanqué dans le bac à gravier, l’autre avait fini sa course à moitié sur la piste. Le drapeau rouge fut quasi immédiat.  

     – Plus de la moitié de ses pilotes sont sous la coupe d’une écurie de Mach 1, et les autres sont dans des équipes investies depuis un bout de temps. Torres à peut être gagné une place sur la grille à Manchester, ça ne veut pas dire qu’on va le voir rester jusqu’à la fin de la saison.  

     Ricky hocha la tête. Jean semblait d’accord, et ils en restèrent là.  

   Antton était sorti de sa voiture, mais il avait gardé son casque. Quelle horreur c’était d’avoir à revivre à nouveau le départ. Le premier s’était parfaitement déroulé pour lui, s’il n’avait gagné aucune place dès le premier virage, il n’en n’avait pas perdu non plus. La tension qui venait avec la course n’était pas redescendu, et devoir attendre sans n’avoir rien à faire était un supplice.  

     – Qu’est-ce qu’il s’est passé ? demanda Flo en revenant vers le bar.  

   Il avait échangé sa place avec Charlie pour qu'il puisse suivre et tout raconter à Tallie lorsqu’elle arriverait après le travail.  

     – Drapeau rouge, grimaça-t-il.  

     Il suivait de très près les agissements du numéro neuf, dont on ne cessait de parler. En plus de savoir que Tallie le connaissait, il était curieux de voir comment il allait se débrouiller, maintenant qu’il connaissait son parcours.  

    Lorsque, enfin, après quinze interminables minutes, Antton put remonter dans sa Mach, il n’entendait plus que son cœur battre dans ses oreilles. Il repartait en treizième position, du côté propre de la piste. Le pilote devant lui allait-il reproduire son action du premier départ ? Devait-il parier là-dessus ? 

     Le premier feu s’alluma, il fallait prendre une décision. Peut-être réfléchissait-il trop. Il ferma les yeux le temps que le second feu s’allume et murmura une nouvelle fois sa prière.          Le cinquième feu s’alluma, il retint son souffle, puis ils s’éteignirent tous d’un coup. Antton relâcha l’embrayage et écrasa l’accélérateur. Devant lui, la voiture avait calé et ne démarra pas, dans un réflexe miraculeux, il braqua au dernier moment et l’évita de justesse. Ce faisant, il se déporta à l’intérieur de la piste, et d’un freinage tardif, mangea un pilote à la sortie du premier virage.  

     – Magnifique, commenta Jean.  

     Antton avait l’impression de ne jamais avoir été aussi concentré. Ses adversaires ici étaient bien plus agressifs et incisifs que ceux contre qui il avait couru au Brésil. C’était comme s’il redécouvrait la piste, et avec tant de voiture devant et derrière lui, il n’était pas libre de ses mouvements. Il fallait attendre, attaquer tout en économisant ses pneus, et tenir jusqu’à ce que le trafic se fluidifie.  

     Antton avait l’impression de subir et d’être emporté par le courant sans avoir la possibilité d’y répondre. Son cœur battait si fort qu’il n’entendait même plus le rugissement des moteurs. Sa poitrine se serra peu à peu, et il commença à manquer d’air.  

     – Pourquoi rentre-t-il maintenant ? demanda Jean en se penchant vers la baie vitrée pour apercevoir le numéro neuf entré dans la ligne des stands.  

     – Problème mécanique ? suggéra Dixon.  

     – ça m’étonnerait, répondit Ricky, sa voiture est peut-être la plus fiable de la grille. 

     – Qu’est-ce qui se passe ? cria Matthew pour couvrir le bruit.  

     – J’ai besoin d’air... souffla Antton.  

     Il le regarda comme s’il avait perdu l’esprit, puis fit signe aux autres de venir changer les pneus. Après cela, John le renvoya aussitôt en piste.  

     Antton cligna des yeux plusieurs fois, et ravala ses larmes. À ce moment, son père lui manqua si cruellement que son cœur sembla cesser de battre un instant.  

     – Je me demande bien ce qu’il a pu se passer... souffla Ricky en le voyant repartir.  

     Il avait perdu toute l’avance qu’il était parvenu à creuser, et se retrouvait dans le peloton de fin, coincé derrière des voitures moins rapides que lui. Venait-il de gâcher sa course ?  

À San Juan, Braulio parvenait enfin à capter le canal qui diffusait la course sur la radio du garage.  

     – ¡ Maravilloso! Joel ! 

    –... Mais il n’a fait que changer ses pneus, ce qui exclut tout problème technique. Pourquoi être rentré si tôt ? Il était remonté jusqu’à la onzième position après ce fabuleux second départ et était rentré dans les points, alors pourquoi avoir ainsi sapé toutes ses chances ? 

    – Qu’est-ce qu’il s’est passé ? demanda Joel en se précipitant près de la radio.  

  Braulio haussa les épaules et ils attendirent en espérant que les présentateurs en diraient davantage, la peur au ventre.  

     Derrière sa caisse, Genevalisse avait cessé de scanner les articles et regardait la télé derrière sa cliente, interdite. Le son était coupé, mais son instinct de mère lui soufflait que quelque chose n’allait pas.  

     Flo et Charlie s'étaient figés, le regard fixé sur la télé. 

Antton roula en apnée durant plusieurs tours, coincé dans le trafic. Et puis, dans un raisonnement que l’on ne peut avoir que dans ses conditions, il se fit la réflexion qu’ainsi, et sans donner le moindre spectacle, il y avait peu de chance que son nom soit mentionné à la radio, et que sa voiture passe à la télé. Sa famille avait promis de suivre la course, mais que penseraient-ils s’ils ne le voyaient pas ? 

– Hohohoooo ! On dirait que le numéro neuf en a eu assez de stagner en bas du classement ! s'exclama Valéry Beaufort à la radio. 

Braulio et Joel échangèrent un regard et revinrent vite vers le poste, cessant de faire les cents pas et d’imaginer le pire.  

Les présentateurs s’exclamèrent dans leur micro :  

– Aïe, ce n’est pas passé loin ! grimaça Ray Turner. 

– Quel dépassement ! À ce rythme, il serait peut-être bien capable de rattraper son retard !  

– Oui, enfin, c'est sans compter la dégradation de ses pneus. Avec un arrêt aussi prématuré, s’il veut les emmener jusqu’au bout de la course, il ne va pas pouvoir taper dedans autant qu’il le voudrait.  

– Il s’est passé quelque chose, conclut Joel.  

Il grimaça et reprit les cents pas.  

À l’arrivé dans la ligne droite de départ arrivé, Antton riva les yeux vers le muret, et guetta la pancarte de son équipe qui lui annoncerait sa place dans le classement.  

– Carajo... jura-t-il.  

Combien de tours restait-il ? Parviendrait-il à rentrer à nouveaux dans les points ? Et que diable lui avait-il prit ?!  

Il appuya sur l’accélérateur, et se jeta à l’intérieur du virage suivant, frôlant la touchette et dévorant son adversaire. Un centimètre plus à gauche, et s’en était fini d’eux deux.  

– On ne peut pas nier qu’il sait conduire, commenta Jean.  

– Non, souffla Dixon avec un sourire, il court. Ce garçon est un coureur, pas un pilote. J'en mets ma main à couper.  

Ricky lui jeta un regard un coin. Dixon s’était hissé au rang le plus haut en remportant la saison précédant un deuxième titre de champion, et en gagnant la même année le Grand Prix d’Ostal Cristo. Lui était un véritable coureur : il ne se contentait pas de piloter, il vivait la course. Des pilotes comme lui, il n’y en avait pas cinquante. Comme il était injuste de savoir qu’Antton ne serait pas aidé dans sa carrière, et qu’il devrait toujours se battre pour parvenir à rester dans la course.  

Charlie grimaça, les mains sur la tête. Une fois encore, Antton avait manqué de mettre fin à sa course.  

– Il va tout foutre en l’air s’il continue comme ça... grommela John depuis le muret.  

Il venait de lui indiquer avec la pancarte qu’il restait quinze tours.  

– Peut-être devrions-nous préparer les pneus, suggéra Matthew. La dégradation de ses gommes m’inquiète.  

– À quinze tours de la fin ? Il ne va pas rentrer maintenant, il a déjà perdu suffisamment de temps en s’arrêtant pour remettre du carburant à mi-course. 

– Je crois surtout qu’il ne va pas relâcher l’accélérateur, marmonna Matthew.  

Malgré sa réticence, John vint l’aider à sortir les gommes, grommelant lorsque les garages adjacents leur jetèrent des regards interrogateurs. Et ils eurent raison de se presser, car déjà, Antton s’engageait dans les stands. Matthew aurait bien voulu célébrer et crâner devant John, mais ils n’en eurent pas le temps. Concentrés, ils changèrent les pneus aussi vite que possible, et Antton passa la première à peine eut-il touché le sol.  

Les mécaniciens de son équipe se précipitèrent vers le muret et se penchèrent pour tenter de l’apercevoir. Devant eux, dans la ligne droite, remontait à toute vitesse le concurrent placé à la dixième place.  

– S’il pouvait lui passer devant... 

– La ferme ! coupa John. Il va y arriver.  

Ils retinrent leur souffle. Dans le garage à San Juan, Joel et Braulio retinrent leur souffle. Genevalisse cessa à nouveau de scanner ses articles, et Flo et Charlie se figèrent une fois de plus. 

–... Ça va être trop court !  

– Non, il y est parvenu ! Antton Torres remonte à la dixième place ! Il s’en est fallu d’un cheveu ! s'écria Beaufort. 

Dans le garage, ils célébrèrent déjà. Antton batailla encore et encore, décidé à ne pas en resté là. Matthew sorti la pancarte pour lui annoncer la nouvelle, mais l’avait-il seulement vu ? 

Le drapeau à damier s’agita et la foule se leva pour acclamer le vainqueur. Les voitures vinrent se garer sur la grille dans leur ordre d’arrivé, et la Mach victorieuse roula jusque sous le podium. Son écurie envahit la piste suivit par celles en deuxième et troisième position.  

Antton souffla profondément, puis coupa le moteur. Autour de lui, les pilotes quittaient leur voiture, rejoint par quelques mécaniciens, par leur ingénieur ou par leur directeur d’équipes. Ils quittèrent la piste, heureux, satisfait, un peu amère ou tout à fait dégoûtés.  

Antton enleva ses gants et ouvrit sa visière. Avec l’adrénaline qui fourmillait toujours au bout de ses doigts, il dégrafa ses sangles, puis enleva son casque.  

– Eh bien, on s’en souviendra de cette première course... commenta Ricky en avisant Antton debout sur le capot de sa voiture.  

Il s’apprêtait à en descendre lorsque Pietro Kantos, le numéro onze, l’avait abordé. Il avait encore ce regard concentré qu’avaient les pilotes en course, et surtout, il avait le nez en sang. 

Chapitre 6 - Antton Torres

     Ricky vit un photographe se précipiter pour immortaliser ce moment, puis s’éloigner avec une mine satisfaite, et eut la sensation qu’ils en entendraient parler.  

   – Est-ce que ça va ? s'inquiéta Kantos alors qu’Antton sautait en bas de sa voiture en pressant ses narines. 

    – Le stress, la fatigue, la chaleur... ça ne devrait pas durer longtemps.  

  – Tu me rassures... Cette bataille, mes aïeux ! J’ai bien essayé de te suivre quand tu es ressorti des stands, mais tu avais un rythme dément ! s'exclama-t-il, admiratif.  

     Antton sourit timidement. Il croisa le regard de Ricky, qui lui fit signe de le rejoindre.  

    – Eh, Torres ! l'appela Kantos alors qu’il s’éloignait. On sort avec quelques autres ce soir, ce serait cool que tu viennes avec nous.  

     Le visage d’Antton s’éclaira.  

     – Désolé, mais je suis attendu, ce soir.  

     Kantos haussa les épaules.  

     – La prochaine fois alors !  

    Il hocha la tête, et rejoignit Ricky. L’ingénieur lui adressa un signe de tête, approuvant sa course, puis lui pointa du doigt quelque chose, un peu plus loin dans les stands. Alors que les écuries de Mach 2 venaient chercher les monoplaces et leur matériel, les équipes de Mach 1 commençaient à ouvrir leur garage et débâcher leur voiture pour la qualification. Antton regarda sans comprendre du côté de Cromwell, et puis il reconnut la monoplace floquée du numéro un. Dixon les remarqua, et les rejoignit, la combinaison tombant sur les hanches.  

     – Je me disais bien que je t'avais reconnu, lança-t-il en arrivant à leur hauteur. C’était une jolie course.  

    – Merci... souffla Antton en piquant au fard.  

    Il s’essuya le visage du dos de la main, gêné de se présenter dans cet état.  

    – Que s'est-il passé pour que tu t’arrêtes si tôt ? 

    Antton eut envie de disparaitre sous terre.  

    – J’ai... J’arrivais plus à conduire... bafouilla-t-il, se sentant honteux.  

    Dixon hocha la tête, compréhensif.  

   – Impressionnant. Il faut avoir beaucoup de sang-froid pour se reprendre comme tu l’as fait et produire une telle performance.  

   – Eh bien, je voulais que l’on parle de moi à la télé pour que mes parents m’y voient, répondit-il sincèrement.  

    Dixon sourit. On l’appela dans son garage, il y avait encore un peu de travail stratégique à faire avant le début de la séance qualificative.  

     – J’ai hâte de te suivre, cette saison, le salua-t-il avant de s’éloigner.  

     Ricky lui adressa un signe de tête, puis lui emboîta le pas. Antton avait du mal à en revenir.  

Chapitre 6 - Premier Virage

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